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de qui aurai je crainte ?

Parmi les multiples sujets d’actualité qui font la une de nos médias, je suis attentif au procès relatif au Médiator, ce médicament dont on ne peut dire combien de personnes sont décédées pour en avoir pris.  Un médicament dont l'usage nocif et même fatal a été dénoncé par Madame Irène Frachon, docteur pneumologue au CHU de Brest.

Il n'est pas dans mes intentions de revenir sur les éléments du procès en cours ; je voudrais simplement partager mon admiration pour cette femme courageuse.
Il y a quelques années, quelques jours avant les fêtes de Noël, j'organisais au Relecq Kerhuon, avec les scouts de France de Brest, une célébration nommée "Lumière de Bethléem". Il s'agit dans cette célébration d'accueillir la lumière venue de Terre Sainte pour la transmettre en divers lieux à l'approche des fêtes de la Nativité. Et dans ce temps de prière et de partage festif, d'entendre une parole invitant à accueillir la lumière dans nos obscurités.
L'idée m'est venue d'inviter Mme Irène Frachon comme "témoin". J'avais appris qu'elle était familière du Temple de l'Eglise Réformée à Brest. Vous ne l'aviez sans doute pas remarqué, mais, comme sur la photo ci dessus, elle porte souvent cette petite croix caractéristique des chrétiens de l'Eglise réformée, dite "croix huguenote". C'est avec grande simplicité qu'elle a accepté l'invitation. Je garde précieusement l'enregistrement des paroles adressées alors aux enfants et jeunes rassemblés à cette occasion. Vous pouvez l'écouter ici...
Dans un langage d'adulte s'adressant à des enfants, elle à brièvement rappelé l'origine et la raison de son combat : un médicament c'est fait pour guérir ; mais des commerçants, qui préfèrent s'enrichir, continuaient de le vendre, tout en sachant les dangers qu'il engendrait. L'important pour eux, c'est que personne ne sache !

Après avoir vérifié avec d'autres médecins ses analyses, s'est posée pour elle la question de savoir que faire.  Il fallait "rapporter" comme on dit à l'école.  "Cela allait provoquer beaucoup de colère, j'allais avoir des ennuis"... Alors je suis allée voir mon pasteur. Avec lui, je me suis rappelée une parole que j'entends depuis que je suis toute petite, à laquelle je n'accordais pas grande importance : "Il faut être au près des plus faibles". Les petits que je dois servir, ce ne sont pas les laboratoires pharmaceutiques, mais les personnes malades...  Seulement, je savais que j'allais avoir des ennuis... Et m'est revenu une autre parole entendue depuis toute petite "N'ayez pas peur !", parole du Christ, reprise par le pape Jean Paul II . J'ai compris alors que je n'avais pas à avoir peur de dénoncer ceux qui tuaient les malades au lieu de les soigner.
Depuis, quand je vais au Temple, je suis attentive aux paroles que j'entends, aux chants, comme celui que vous avez chanté "Le Seigneur est ma lumière, de qui aurais-je peur ?". Dernièrement j'ai entendu ce texte de l'Evangile qui nous raconte que Jésus a renversé les tables des marchands du Temple. Le Temple, c'est le lieu de la rencontre entre Dieu et les hommes, pas celui du "business". Alors, quand des entreprises cherchent à faire des affaires quand est en jeu la santé des gens, je comprends qu'il me faut renverser les tables de manière radicale..."

Merci madame Frachon, merci docteur, merci Irène, soeur dans le Christ. Votre témoignage dans votre combat est une manière de comprendre ce qu'est la mission des chrétiens au coeur de ce monde.

 

Christian le Borgne, curé