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Préparez les chemins du Seigneur

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Préparez les chemins du Seigneur ». Les plus jeunes ne connaissent sans doute pas la comédie musicale « Godspell », (il est vrai que cela nous ramène à l’aube des années Giscard…).

Dans les prédications de l’époque, la manière d’envisager ce travail de « préparer les chemins » était certainement autre, parce que les préoccupations mondiales et nationales de l’actualité étaient autres…Fin de la guerre du Vietnam et de la présidence Nixon, construction européenne, difficultés économiques consécutives au premier choc pétrolier. Dans le diocèse, la revue diocésaine donne écho des réflexions relatives au choix de certains prêtres, de vivre leur ministère comme prêtre ouvrier, notamment dans le monde rural, dans le Porzay par exemple, et de valoriser le travail « en équipe ».

 

L’invitation qui nous est adressée par l’Evangile de « préparer les chemins du Seigneur », n’est pas qu’un refrain que l’on chantonne. C’est un impératif sans cesse actuel et sans cesse à actualiser. Nous avons reçu de la tradition ignatienne une école de discernement, largement promue par les mouvements d’action catholique, qui s’articule autour de trois verbes : « Voir-juger-agir ». Le travail de relecture, du chemin parcouru, des échecs et des réussites fait pleinement partie de ce processus. Invitation à continuer le travail entrepris en gardant en tête les objectifs premiers ; la mission nous est confiée par le Seigneur pour lui préparer la voie !

 

Relire l’histoire, voir les événements encore récents, permet de nous rappeler que contrairement à un refrain entendu, on n’a pas toujours fait comme ça ! Chaque génération imprime sa marque, selon les inspirations de l’Esprit, et aussi les lenteurs de nos cœurs, au cœur de circonstances toujours nouvelles.

 

Relire l’histoire, c’est aussi accepter de faire son deuil des malheurs qui nous arrivent, et nous ouvrir à la joie de l’espérance .
- Le prophète Isaïe, dans une période de crise pour Israël, l'Exil à Babylone, actualise  ce qui a été vécu par le peuple hébreu dans sa traversée du désert.

- Jean le Baptiste, dans sa prédication, reprend le prophète Isaïe. Il ne s’agit plus de revenir au pays, mais de se disposer à accueillir celui qui vient accomplir toute chose nouvelle.

- Après lui, c’est l’apôtre Pierre qui nous ravive dans l’espérance :

Car ce que nous attendons, selon la promesse du Seigneur,
c’est un ciel nouveau et une terre nouvelle
où résidera la justice
.

 

Mais il ne faut pas se contenter de relire l’histoire. Faire mémoire, c’est bien plus que de se souvenir ; faire mémoire, c’est donner consistance aujourd’hui à l’espérance qui nous habite : la venue de ce ciel nouveau et de cette terre nouvelle. Et notamment, en préparant les chemins du Seigneur.

 

Que peut signifier cette expression « préparer les chemins du seigneur ?

Le nouveau secrétaire général du synode des évêques, le cardinal Mario Grech, s’est adressé au pape François au nom des nouveaux cardinaux promus dimanche dernier. Voici un passage de son intervention :

« Les événements dramatiques que l’Église et le monde sont en train de traverser nous amènent à offrir une lecture de la pandémie qui aidera chacun de nous à saisir dans cette tragédie l’opportunité de « repenser nos modes de vie, nos relations, l’organisation de nos sociétés et surtout le sens de notre existence » L’Église […] est appelée à ouvrir des chemins, et même à se remettre elle-même en chemin. C’est la leçon du concile Vatican II qui, au chapitre II de Lumen Gentium, reprend l’idée du Peuple de Dieu en chemin : pour le Nouveau Testament, la condition des chrétiens est celle de pèlerins, qui vivent dans le monde comme étrangers, et qui savent bien qu’ils pourront atteindre la plénitude seulement dans le Royaume de Dieu. À nouveau, au commencement d’un nouveau millénaire, l’Esprit Saint semble nous dire que nous devons redevenir « ceux qui suivent le chemin » (cf. Ac 9,2).

Une Église en marche est une Église où l’on « marche ensemble »  Le Peuple de Dieu n’est pas une somme d’individus ; il est le « saint Peuple fidèle de Dieu ».  Quand on marche « ensemble » on ne se trompe pas de route…

 

Dans ces propos, je perçois des indications concrètes :  comment entendre la voix à préparer la voie ?

- « Les conditions concrètes dans lesquelles nous sommes » :

Repenser les modes de vie, nos relations, l’organisation de notre société, c’est l’appel sans cesse renouvelé à la conversion ! Accueillir des documents majeurs comme « Laudato si » ou « Fratelli tutti » en les lisant, en cherchant à les comprendre, à les confronter à nos modes de vies et à nos choix de citoyens, de consommateurs, de parents, d’éducateurs. Le CCFD-Terre Solidaire nous en propose les moyens.

- « marcher ensemble » :

Non pas « Chacun sa route, chacun son chemin », mais en concertation, en débat, et aussi en acceptant les orientations données à tous.

- « la condition des chrétiens est celle de pèlerins » :

Si Abraham est nommé Père des croyants, c’est parce qu’il s’est mis en marche, il a quitté son pays pour une Terre promise. Jamais nous ne pourrons être « installés » dans nos pratiques de foi ni dans nos pratiques en Eglise.

Les récits de la Nativité nous le rappelleront : Marie se met en route rapidement pour visiter Elizabeth ; les bergers accourent à Bethléem, les mages suivent une étoile… Seuls Hérode et les docteurs de la loi ne bougeront pas : « Allez voir et venez nous dire… ». Mais les mages rentreront par « un autre chemin »

 

 

Préparer les chemins du Seigneur, n’est-ce pas encore et toujours accepter la route, non comme décor, comme arrière plan, mais comme notre condition première de croyant, de marcheurs de Dieu ?

 

Christian Le Borgne, curé

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