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Voici l'Agneau de Dieu

Jean le Baptiste, une belle figure du Nouveau Testament...
Alors que nous allons entrer dans la semaine de prière pour l'unité des chrétiens, je me souviens de cette prédication entendue au Temple de Quimper, à l'occasion de l'arrivée de Françoise Pujol comme pasteure pour l'Eglise Réformée de Quimper et de Brest. Elle avait invité un de ses collègues, vis à vis duquel elle voulait manifester de la reconnaissance, tout comme un jeune prêtre peut inviter comme prédicateur un de ses directeurs de séminaires... Et comme l'évangile du dimanche portait sur Jean Baptiste, le prédicateur nous a dressé le portrait robot du "bon prédicateur". Visiblement il avait en tête quelques bons, mais aussi mauvais exemples parmi ses pairs, et notamment "télévangélistes" à succès !
Jean le Baptiste, disait-il, est capable d'attirer la foule pour lui donner à entendre la Parole. Non pas la sienne, mais faire résonner dans l'actualité de ses auditeurs, le prophète Isaïe.
Mais disait-il, il ne se contente pas d'enseigner, il prend aussi le temps de former des disciples, et notamment à une prière conforme à la Parole reçue. Les disciples de Jésus demanderont à ce dernier : "Seigneur, apprends nous à prier, comme Jean le Baptiste l'a appris à ses disciples" (Lc 11,1).

Enfin, ayant formé des disciples, il ne se les approprie pas, il les invite à le quitter pour suivre quelqu'un d'autre, Jésus, qu'il désigne comme l'Agneau de Dieu. Il s'efface pour laisser croître celui qu'il a annoncé...


Sans doute n'y prêtons nous pas suffisamment attention, lorsque nous chantons lors de la fraction du Pain : "Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde"... nous reprenons dans cette acclamation la présentation de Jésus, comme celui qu'il faut accueillir et suivre, tel qu'il nous est désigné par le Baptiste. Parole, baptême, eucharistie, tout est lié dans une progression qui nous mène au cœur de la proclamation de la foi en Jésus le Christ.
Le péché du monde, expression qui demeure sans doute mystérieuse pour nous... Plus que la somme de nos péchés, le péché du monde est ce refus de Dieu, de sa lumière, de son amour. Non que le monde soit fondamentalement mauvais, car "Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique", mais le monde comme celui qui refuse de l'accueillir. Le Pape François reprend à de multiples reprises cette condamnation de la "mondanité", forme de ce péché du monde. Le site officiel des jésuites le présente ainsi :
Cette « orientation franciscaine » de l’actuel évêque de Rome se conjugue toutefois avec sa profonde spiritualité ignacienne. En effet, deux lignes de force reviennent continuellement chez lui, structurant sa vision et son action : la critique de la « mondanité spirituelle » et l’appel au « décentrement » . La mondanité, n'est ce pas rester enfermé dans "son monde", avec ses normes sclérosées, où toute ouverture à une approche plus inconfortable est dénoncée comme inconvenante : respect de la personne en situation de fragilité, respect de la création... Ce n'est pas rien qu'en cette semaine de prière pour l'unité des chrétiens, ce soit la situation des migrants échoués sur nos plages qui soit mise en lumière, en écho au récit des Actes des Apôtres "Ils nous ont témoigné une hospitalité peu ordinaire".

"Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde, donne nous la paix"... Accueillir la paix, construire la paix, n'est ce pas accepter ce chemin que nous désigne le Baptiste ? Accepter d'écouter l'invitation à la conversion, "préparez les chemins du Seigneur"; accepter comme le Christ de plonger dans les eaux vives de notre pauvreté humaine pour reprendre souffle au souffle de l'Esprit ; accepter d'abandonner toute idée de prestige ou de domination pour vivre sous la seule loi de l'amour, au risque de donner sa vie.

 

Jean ne désigne pas un bouc émissaire, le coupable de circonstance cause de tous nos tourments, il nous désigne l'Agneau sans péché source de paix véritable.

 

Christian Le Borgne, curé.